Roulez jeunesse… sur des bio-bitumes !

L’asphalte que l’on trouve sur nos routes découle globalement d’un mix bitume + granulats. A l’inverse de ces derniers constitués de matière minérale (roche, sable, gravier) tout à fait naturelle, le bitume est obtenu à partir d’hydrocarbures saturés donc de pétrole brut.

Si les acteurs du marché du goudron (essentiellement composé d’hydrocarbures non saturés) et du bitume commencent à se voir soumis quelques exigences environnementales, aucune obligation n’existe à ce jour pour tendre vers des revêtements 100% écologiques.

En effet, selon construction21.org, les goudrons utilisés pour la construction des routes « contiendraient des composants qui brûlent sous l’effet de la chaleur en libérant des gaz toxiques ». Ces composants organiques – quand ils ne sont pas chimiques – peuvent être source de dangers pour la santé du personnel des sociétés concernées, celle des riverains et de la nature environnante.

Le goudron et ses dérivés fluxants (= dont la viscosité a été réduite par l’ajout d’une huile de fluxage) houillers ont été identifiés comme des cancérogènes avérés (source : Institut National de Recherche et de Sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles).

Toujours selon l’INRS, « une fois chauffé (à des températures pouvant atteindre voire dépasser 210°C), le bitume émet des fumées » irritantes pour les voies respiratoires. Les substances dangereuses ainsi libérées portent les « doux » noms d’hydrocarbures aromatiques polycycliques, d’hydrocarbures linéaires ou encore d’aromatiques… Pas tout à fait les mêmes que ceux qu’on utilise pour assaisonner nos plats ! Parmi les principaux symptômes observés : toux, maux de tête et perte d’appétit.

Il est important toutefois de préciser que, « dans des conditions normales de température et de pression atmosphérique, le bitume ne présente(rait) pas de dangers ».

Biobitumes

Le liant Vegecol, développé depuis bientôt 20 ans par Colas, filiale du groupe Bouygues, auraient des performances mécaniques similaires à celles du bitume, par exemple en termes de résistance. Par ailleurs, ce procédé présente l’avantage de faire appel à une grande variété de granulats donc potentiellement à des matériaux locaux, pour un approvisionnement amélioré.
Autres avantages à noter : aucun traitement spécifique n’est requis pour son application et celle-ci permettrait un gain énergétique de 40° (110° au lieu des 150°C exigés par les revêtements habituels).
Pour finir, le Végécol permet une meilleure intégration paysagère puisqu’il est transparent ; ce qui lui permet de laisser apparaître la couleur naturelle des granulats qu’’il agglomère, ou de réaliser des enrobés de différentes teintes avec des colorants (naturels).

Lancé en 2015 dans la région Pays de la Loire, le projet Algoroute a été lancé dans le but d’utiliser de la biomasse microalgale pour fabriquer du biobitume.
Dans un dossier de presse publié il y a quelques mois sur le sujet par Ifsttar.fr (désormais Université Gustave Eiffel), on apprend qu’en remplaçant « 50 % du bitume dans les enrobés routiers par du bitume d’algue (…), c’est de l’ordre de 1 million de tonnes de produits pétroliers qui pourraient être économisés chaque année en France ».
L’un des gros points forts des micros-algues : il s’agit d’un matériau déformable donc capable d’absorber de fortes contraintes et pressions causées par les nombreux passages des poids lourds par exemple.
Toujours selon l’institut de recherche français, les premières algoroutes expérimentales pourrait voir le jour d’ici cinq ans.

Faits à base d’huile végétale de pin, les goudrons « naturels » empêchent la libération de gaz et de vapeurs toxiques. En outre, aucune contamination n’est engendrée par le ruissellement des eaux.

Et pourquoi on « enverrait pas du bois » – pied au plancher dans notre bolide rutilant – sur… du bois justement !?

Terminons ce tour d’horizons des solutions alternatives concernant le macadam que l’on trouve sur nos routes par une initiative locale qui devrait plaire à l’imprimerie VIllière ! Le Biophalt, crée par Eiffage Route, est un enrobé présenté comme neutre en termes d’émissions carbone, fabriqué à l’aide d’un liant végétal créé avec des déchets papier et une poix sylvicole issue de pin des Landes.
L’expérimentation lancée sur le canton de La Roche-sur-Foron (précisément sur une portion de la RD102 à Pers-Jussy) va durer 3 ans. A l’issue de cette période, un bilan permettra d’évaluer les performances du biobitume et de vérifier si les objectifs ont été atteints au niveau de la réduction des GES. Un autre essai va être prochainement réalisé sur une autre chaussée du département.
Cet enrobé écologique a aussi été sélectionné pour être utilisé sur une piste cyclable du Grand Lyon qui vient d’être achevée où y flotte désormais un agréable parfum de pin ! Malgré un surcout de 25%, cet enrobé est présenté comme étant doublement bio avec « une empreinte carbone quasi-neutre » car fabriqué à proximité (à Beaujeu, dans le Rhône) et car il composé à 50% de granulats récupérés sur des chaussées réformées de la Métropole.

Il existerait en France environ six cents installations de ce type, respectant à la fois la santé des usagers mais aussi celle de l’environnement.
Beaucoup d’usagers et d’ouvriers du secteur (sans parler de « ceux » qui ne peuvent parler…) sont loin d’y trouver leur compte.
En plus du lancement de travaux d’envergure pour des projets de transports en commun et de mobilité douce, il parait plus que souhaitable d’imposer petit à petit les biobitumes. Avant que les pollutions, les maladies et les cancers ne fassent trop de ravage.

SOURCES :
https://www.inrs.fr/risques/bitume/effets-sante.html
https://detours.canal.fr/bio-bitume-une-route-ecologique-a-base-de-bois/
https://www.construction21.org/france/articles/h/bientot-du-goudron-ecologique.html
https://www.ifsttar.fr/fileadmin/redaction/5_ressources-en-ligne/Communication/Espace_presse/Dossiers_de_presse/Algoroute_Fr.pdf
Haute-Savoie Magazine n#186)
https://www.lesechos.fr/pme-regions/innovateurs/eiffage-route-pose-son-enrobe-ecologique-biophalt-a-lyon-1268418

8 Comments

  1. L’écologie est de plus en plus importante, surtout avec le climat actuelle. Voir vos articles m’encouragent a militer de plus en plus pour la planète merci.

  2. Sujet très intéressant, je ne connaissais pas ce bitume d’un nouveau genre, un vrai bijou technologique ! Quel est le coût d’une telle installation pour une portion de route/autoroute ?

  3. Les revêtements routiers « new-age » sont une réalité et apportent tous des avantages environnementaux indéniables.
    Maintenant est-ce la bonne question à poser ? Devons nous toujours bitumer plus ? Devons nous continuer de nous déplacer toujours autant ? Notre mobilité de l’ancien temps n’est-elle pas le premier facteur à remettre en cause avant de penser à bitumer, même avec des enrobés vertueux ?
    Je milite de longue date pour la voiture électrique, qui est vertueuse au niveau des émissions à l’usage, mais l’on sait qu’elle ne règle pas tout et de loin.
    Dans ce contexte, quand acceptera-t-on de mettre au débat la remise en cause de notre hyper mobilité ?

  4. Débat très intéressant. Quitte à protéger l’environnement, autant ne pas « bétonner » même de façon respectueuse de l’environnement, car ainsi on privilégie l’automobile. Dans un sens, ce type de solutions est contre-productive et représente un aveu d’échec d’une vrai politique environnementale.

  5. Merci pour votre commentaire, effectivement béton et « protéger l’environnement » semblent être contraire. Dans le meilleur des cas, mieux vaux laisser l’espace naturel.

  6. Article très interessant. Je ne m’était jamais posé de tel question sur l’origine des matériaux que composent nos routes. Qu’en est-on du projet Algoroute ?
    Je vais me renseigner à ce sujet.

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