Gaz de schiste : quand la Yaute résiste

Gaz de Schiste : quand la Haute Savoie entre en résistance
Les opposants au gaz de schiste de toute la Haute-Savoie (et même de Genève) se réuniront ce week-end pour dénoncer le permis de Gex et les dangers de son exploitation sur l’environnement et sur la santé. Une manifestation à l’initiative du collectif Non au gaz de schiste 74 aura lieu Samedi 11 Février 2012 à Saint-Julien-en-Genevois, transformé pour l’occasion en véritable Larzac citoyen du gaz de schiste.

Qu’est-ce que le gaz de schiste ?

Le gaz de schiste est un gaz naturel extrait à partir de terrains schisteux et composé principalement de méthane. Dit non-conventionnel, il est obtenu par fracturation hydraulique : une technique qui consiste à forer verticalement puis à injecter de l’eau sous pression dans la roche pour créer des fractures et libérer le gaz.

Quelle est la situation en France ?

64 demandes de permis d’exploration de gisements de gaz de schiste ont été réalisées en France par différentes sociétés nationales et étrangères. Très rapidement, les insuffisances du code minier ont été pointées du doigt par différents élus et associations qui dénonçaient les risques liés à la technique de fracturation hydrolique [ndr : cf paragraphe sur les dangers du gaz de schiste].

Une 50ène de maires ont même procédé à des arrêtés d’interdiction pour manifester leur opposition, répondre à l’absence de concertation avec les parties prenantes, et dénoncer la non-consultation des populations pour la délivrance de permis de recherche : des insuffisances relatives au code minier que seul le gouvernement ou le parlement (via un amendement) peuvent modifier.

Sous pression, l’Assemblée Nationale (les députés) et le Sénat ont adopté la loi du 13 juillet 2011 qui interdit en France l’exploitation des gaz de schiste par fracturation hydrolique, et oblige les entreprises ayant fait une demande de permis de soumettre un rapport précisant les techniques employées ou envisagées dans le cadre de leurs activités de recherches.

Le 13 Septembre 2011, les entreprises ont rendu leurs copies. Le mois suivant, 3 demandes ont été abrogées (invalidées) par l’état : celles de Nant, de Villeneuve-de-Berg et de Montélimar.

61 demandes de permis sont donc toujours en cours de validité sur tous le territoire (voir la carte).

Selon François Veillerette, porte parole de l’association Générations Futures (et co-auteur avec Marine Jobert du livre le vrai scandale du gaz de schiste), qui remet en question les rapports des industriels : « les documents internes de la firme Toréador prouvent que les industriels n’ont pas renoncé. La seule solution pour en finir est d’interdire l’exploration et l’exploitation de tous les hydrocarbures non conventionnels. » – Ecoutez plutôt son interview en podcast (à partir de 32:30).

Malgré différentes zones d’ombre persistantes relatives à la fracturation hydrolique, les compagnies pétrolières et gazières ayant fait une demande de permis pourront obtenir un permis de concession.

Quels sont les dangers du gaz de schiste ?

La fracturation hydrolique nécessite des quantités d’eau très importantes, 15000m3 par forage horizontal selon Nathalie Kosciusko-Morizet (ministre de l’Écologie, du Développement durable, des Transports et du Logement). Une activité qui impacterait de façon significative le niveau des nappes phréatiques.

Mais le gaz de schiste aurait d’autres répercutions sur les cours d’eau : lors de la fragmentation de la roche, et le long des parois cimentées des puits, des fissures peuvent se créer dans le ciment et laisser passer le gaz en contaminant les nappes phréatiques. Des conséquences inquiétantes ont été observées aux états-unis, en sortie de robinet, directement chez les habitants des zones attenantes aux forages : au contact d’une source de chaleur, l’eau s’enflamme. Des chercheurs américains ont même constaté une eau jusqu’à 17 fois plus chargée en méthane.

Qui plus est, l’adjonction de produits chimiques nécessaires à la fracturation hydrolique aurait un effet dévastateur sur l’environnement (et certains seraient même interdits par la directive Reach). Le professeur André Picot, directeur de recherche honoraire du CNRS avance même des liens de causalité entre plusieurs phénomènes inquiétants observés dans le monde, et l’extraction de gaz de schiste.

En Janvier 2011, une pluie d’oiseaux morts s’abattait sur l’Arkansas. Il faut savoir que dans le processus d’extraction, l’eau issue des forages de gaz de schiste est stockée dans des bassins de décantation pour être traitée. Mais les vapeurs de ces eaux sont dangereuses, surtout quand elles contiennent du BTEX (composé de benzène), non seulement pour les oiseaux mais aussi pour les populations avoisinantes.

En Mai 2011, l’Allemagne est touchée par la bactérie Escherichia coli : là encore, la piste du gaz de schiste est avancée.

http://www.dailymotion.com/video/xhfvhy_gasland_news

Un contexte géopolitique favorable au gaz de schiste

Si l’Europe est en position attentiste sur la problématique du gaz de schiste et l’éventualité d’une réglementation commune, certains états membres ont déjà fait le choix de fragmenter un peu plus leur mix énergétique (ou bouquet énergie). C’est le cas de la Pologne, qui souhaite devenir le Qatar de l’Europe centrale [ndr : le Qatar, la Russie et l’Iran détiennent plus de la moitié des réserves mondiales de gaz conventionnel du monde].

Malgré l’étude sur les gaz de schiste présentée par Sandrine Bélier (députée Européenne) devant la Commission Environnement du Parlement européen, sa demande de lancer un moratoire sur les gaz de schiste (ainsi que l’interdiction de la fracturation hydraulique au niveau européen) n’a pas abouti.

Aux États-Unis, les gaz non-conventionnels représentent plus de 50% de la production gazière. Un chiffre à mettre en balance selon Fatih Birol (économiste en chef de l’Agence internationale de l’énergie), pour qui le boum du gaz de schiste a déjà causé une baisse de 50% des investissements dans les énergies renouvelables comme dans le solaire et l’éolien aux États-Unis.

Election 2012 : une occasion de peser sur le débat

A moins de 90 jours de l’élection présidentielle de 2012, la filière pétrolière souhaite rouvrir le débat sur le gaz de schiste et défendre ses positions auprès des politiques. Le patron de GDF Suez prétend même que privilégier les énergies renouvelables pénaliserait notre compétitivité.

Malgré l’intérêt d’élargir notre bouquet énergie, on ne peut objectivement pas occulter le fait que l’exploitation de gaz de schiste met en danger la santé des populations et leur environnement. Il n’est plus même question d’évoquer le principe de précaution tant les conséquences sont avérées. Il faut donc alerter les Français et exiger un moratoire sur le gaz de schiste, voir l’abrogation absolue des demandes de permis d’exploration, et des permis d’exploitation des gisements de schiste.

La mobilisation citoyenne face au gaz de schiste

A l’instar du collectif anti-gaz de schiste de la Drôme, la vigilance citoyenne s’est organisée pour répondre présent massivement et à tout moment face à l’arrivée (éventuelle) des premiers camions transportant les foreuses. Le but de ces citoyens étant d’empêcher l’installation des compagnies et d’éviter le carnage en bloquant leur progression.

En local, des dizaines d’associations se sont fédérées au sein de collectifs (voir la carte de France des collectifs anti-gaz de schiste). Il n’existe pas d’organisation nationale, mais en Rhônes-Alpes, le collectif Stop gaz de schiste fédère plusieurs délégations départementales, et le site No fracking France sert de lien avec d’autres pays.

Selon Martine Feraille du collectif Non au gaz de schiste 74, les élus locaux ont quelques moyens d’action (limités) : ils peuvent par exemple demander préventivement un état zéro sur de l’eau auprès de leur préfet pour faire un bilan avant tout forage éventuel. Ils peuvent également prendre des arrêtés concernant la circulation de camions : une mesure extrême pour une municipalité, mais qui acte de la volonté (et du devoir) des élus de protéger les populations.

Les citoyens ont aussi la possibilité d’interpeller leurs élus en leur écrivant directement. Nous vous proposerons prochainement une lettre type à adresser au maire de votre commune, mais vous pouvez également nous proposer la votre en commentaire de cet article : agissons maintenant, car demain il sera trop tard !

Inspiration : agoravox – deleaudanslegazla croix20minutesfranceinfo – viry74 – sciencesetavenir – ledauphine –  developpement-durable.gouvcdurable – farmwars – pratclif
Ressources : infographie – podcastpodcast (32:30)livre Le Vrai scandale du gaz de schisteapplication fracturation hydraulique
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Community Manager de l'imprimerie Villière (imprimerie écologique).

One Comment

  1. La vidéo de la manifestation contre le gaz de schiste à saint julien en genevois : http://www.lavoixdesallobroges.org/environnement/474-manifestation-a-saint-julien-en-genevois-contre-lexploitation-des-gaz-de-schiste et un article de la tribune de Genève http://www.tdg.ch/geneve/france-voisine/Pres-de-2000-personnes-manifestent-contre-lexploitation-du-gaz-de-schiste/story/31285983

    RDV est pris en Mai à Lyon pour une manifestation régionale anti-gaz de schiste.

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