Comment ne plus avaler n’importe quoi?

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Adeptes du bios, écolos, locavores… allez, tous dans le même panier ! On entend parfois souvent des énormités à la télé, mais le seul moyen qui nous est donné d’inter-agir est de changer de chaine ou d’éteindre notre poste. J’ai donc souhaité ouvrir ici un débat en avançant mon point de vu sur ces différents modes de consommation.

Recadrons le sujet

Avant de consommer il faut produire, les vraies différences se jouent à ce niveau… et non pas sur l’étiquette.

Voici plusieurs types d’agricultures qui font vivre le marché agro-alimentaire, les centrales d’achat et (parfois) les producteurs.

agriculture biologique : agriculture sans engrais, pesticides de synthèse ou OGM.

agriculture intensive : agriculture visant à maximiser le rendement d’une production par tous les moyens (utilisation d’engrais chimiques, d’herbicides, de fongicides, d’insecticides, de régulateurs de croissance, de matériel plus performant, irrigation intensive, culture sous-serre, sélection génétique…).

agriculture raisonnée : agriculture visant à prendre en compte la notion de protection de l’environnement dans ses méthodes de production (jachère, limitation des intrants, irrigation raisonnée…).

agriculture paysanne : agriculture qui vise à obtenir des produits de qualité (frais, de saison), promouvoir la diversité (espèces, races, façons de produire…), maintenir l’activité agricole en garantissant un revenu correct à l’exploitant et de servir de lien social.

Les labels bios reconnus

– Au niveau national, les produits issus de l’agriculture biologique sont regroupés sous le label AB, contrôlé par Ecocert.

– En Suisse (à 5 kilomètres de notre imprimerie), le label Bourgeon encadre l’agriculture bio, il est d’ailleurs reconnu comme l’un des plus stricts.

– Au niveau Européen, un label (règlement 834/2007) peine à se mettre en place et devrait être effectif au 1er janvier 2010. Un concours ouvert aux étudiants a été lancé pour dessiner le futur logo.

– Au niveau international, la fédération internationale d’agriculture biologique est regroupée au sein du réseau Nature et Progrès.

Les pour et les contre

Avoir une alimentation saine à base de produits vierges en substances de synthèse (engrais, OGM, phytosanitaires…) est l’une des motivations des consommateurs de bio. Outre le fait de préférer des aliments moins nocifs pour la santé, ce qui soit dit en passant est parfaitement louable, le bio a été associé par le grand public à l’idée qu’il n’existe qu’un type d’agriculture bénéfique pour l’environnement (peut-être à ses dépends en raison du matraquage et des campagnes de marketing).

La question qui mérite d’être soulevée aujourd’hui est de savoir si ce mode de production est vraiment durable, en l’état actuel, et s’il ne risque pas de se tuer lui-même… et auquel cas, ne devons-nous pas concevoir une agronomie différente.

Je m’explique : prenons le cas de ce reportage diffusé sur une grande chaine de télévision française dans lequel on nous montrait des pommes de terre estampillées bio qui poussent en Egypte dans le sable et qui sont arrosées par les eaux du Nil.

Ce qui m’a interpellé en premier lieu, c’est que l’on utilise l’eau d’un des fleuves les plus pollués de la terre pour irriguer un produit bio. Soit il existe une variété répulsive aux polluants (mais j’en doute), soit le produit n’est plus totalement sain et par extension plus bio non plus.

Second constat, c’est que ces pommes de terre vont faire plus de 3000 km pour finir dans nos assiettes.

Si on globalisait cette façon de produire sans tenir compte de la distance parcourut, les aliments ne seraient plus sains longtemps en raison des émissions de GES (gaz à effet de serre) imputées au transport.

Un choix de consommation et des alternatives

L’agriculture intensive a su répondre de manière temporaire à l’accroissement de la population mondiale.

Aujourd’hui, ce mode de fonctionnement n’est plus viable sur le long terme car il met en péril nos ressources (pollution des sols et des nappes phréatiques, sur-exploitation des terres arables, rentabilité privilégiée au détriment de la qualité du produit).

L’agriculture biologique montre ses limites (dans le cas des produits importés) : si l’on utilise plus de kérosène pour achalander la marchandise que d’intrants pour produire localement, on finira tôt ou tard par ne plus avoir aucun produit sain sur terre (peuvent ils encore l’être?).

Sans prétendre détenir la vérité, je pense que le type d’alimentation le plus adapté pour respecter l’environnement et la santé des hommes résulterait d’un mixte entre agriculture raisonnée, bio et paysanne.

Une alimentation à base des produits locaux et cultivés de façon raisonnée (cf. agriculture raisonnée) pourrait être un modèle favorable.

Dans cette optique, les locavores (terme issu du mouvement slow food) font office de pionniers. Sans tomber dans une façon extrême ou radicale de consommer (ou comme les plus férus à n’acheter que des aliments produits dans un périmètre maximum de 240 kilomètres de son domicile), la notion de proximité m’apparait comme une alternative viable.

On constate le succès grandissant des AMAP (Associations pour le maintien d’une agriculture paysanne), crées pour préserver l’existence des fermes de proximité dans une logique d’agriculture durable, socialement équitable et écologiquement saine (voir la charte des AMAP).

Le principe étant de permettre aux consommateurs d’acheter des produits d’alimentation de qualité (fruits, légumes, œufs, viandes, fromages…), de connaitre leur provenance et la manière dont ils sont produits.

Et demain ?

Un nouveau mode agronome est peut-être en train de voir le jour en France suite au grenelle de l’environnement, il s’agit de l’agriculture HVE (à haute valeur environnementale). Cette certification environnementale s’inscrit dans le plan Objectif Terres 2020.

Une démarche d’économie solidaire initiée par une association de consomm’acteurs appelée Terre de Lien est en train de « gagner du terrain ». Cette foncière, qui a obtenu le label Finansol, achète des terres et des fermes pour permettre à de jeunes agriculteurs de pouvoir se lancer sans avoir à s’endetter lourdement. Chacun peut devenir actionnaire et permettre à une nouvelle génération d’agriculteurs de prendre le relai dans les meilleures conditions. Terre de lien permet aux consommateurs de mettre en commun des fonds et de les utiliser pour développer un sytème responsable et solidaire.

Mon avis personnel

Comme je n’aime pas laisser des questions sans réponse, je dirais qu’à titre personnel je privilégie l’achat de produits locaux, sans être locavore pour autant et que pour l’instant je ne fais pas parti d’une AMAP (mais que j’envisage cette solution). Je pense que les produits bios sont bénéfiques pour la santé mais qu’il ne faut pas pour autant que le goût soit mis de côté tout comme la diversité. Moi-même fils d’agriculteur, je mesure chaque jour la difficulté à faire vivre une exploitation agricole (fluctuations du court du lait, augmentation du prix des carburants, coût et manque de main d’oeuvre qualifiée, des céréales…), bien souvent, une seule personne pour gérer plus de 50 hectares et un troupeau.

J’entends déjà certains avancer que l’Europe aide assez les paysans avec toutes les primes et qu’on ne voit pas ça dans d’autres secteurs… mais qui nourrira les gens si les producteurs mettent la clef sous la porte, l’industrie?

Peu importe le nom qu’on trouvera à cette agriculture, si elle respecte l’environnement, le producteur, le consommateur et privilégie la qualité, j’y serai favorable.

Lectures complémentaires :

– Site officiel de la campagne de promotion de l’agriculture biologique dans l’Union européenne

– Visitez le Portail très complet de Wikipédia sur l’agriculture et l’agronomie

– Découvrez les AMAP proches de chez-vous via le site national des AMAP

– Télécharger la brochure sur la certification environnementale HVE des exploitations

– J’ai été étonné de lire la mention « contient sulfites » sur une bouteille de vin bio : Pourquoi utilise t-on des sulfites dans le vin?

About the author
Community Manager de l'imprimerie Villière (imprimerie écologique).

11 Comments

  1. votre article résume parfaitement la situation et va dans le sens de ce que j’essaie d’expliquer à pas mal d’amis qui veulent maintenant (et maintenant seulement) se mettre à plus de bio
    avant l’idée les intéressaient mais ils trouvaient cela trop cher
    aujourd’hui ils trouvent que cela devient abordable quand on voit que les grandes surfaces voire les discounter distribuent du bio
    et là je leur ai conseillé de regarder leurs étiquettes…
    et de se rendre compte que leur bio « de supermarché » venait d’egypte, d’Israel ou d’encore ailleurs…quelle n’a pas été leur surprise et leur déception…
    peut-être qu’il faudrait faire encore un autre label de type « éco-bio » ?
    toujours est-il que l’éducation dans le domaine est encore à poursuivre, la route semble prise mais sans pour autant qu’elle ne soit très réfléchie…
    les amap sont une excellente initiative, il existe meme des amap bio, mais cela reste toutefois marginal car l’engagement dans une amap n’est pas toujours évident quotidiennement pour les familles…
    Personnellement cela fait plusieurs années que je fais très attention à mes achats, que j’essaie d’acheter tout le frais chez des producteurs locaux et de respecter les saisons (sauf exception car je vis comme tout le monde dans une société de consommation et que je peux craquer 2 à 3 fois par an pour une mangue venant d’un pays lointain ;)) mais je reconnais que cela demande du temps, temps que la plupart des personnes n’ont pas toujours, surtout lorsqu’elles vivent en agglomération, ou qu’on leur met sous le nez des tonnes de marchandises appétissantes et à bas prix (je pense aux fraises souvent montrées en tête de gondole de supermarché alors qu’il fait encore froid dehors)…
    Bref il est bien que des articles comme le vôtre puissent être consultés car il met un peu les pendules à l’heure, il reste encore beaucoup à faire pour mieux se nourrir en utilisant au mieux les ressources dont on dispose…

  2. n’y manquerait-il pas les poivrons et piments sur juin juillet aout ?
    ou alors mes yeux fatiguent 😉

  3. Même problème au Québec. Les fraises bio de la Californie, pas vraiment écolo. Je favorise donc un bon mélange entre ces types d’agriculture. Car certains sont très proches du bio mais n’ont pas l’énergie, l’argent ou la possibilité d’être certifiés.
    Les Ami-e-s de la Terre de l’Estrie ont crée le Marché de solidarité régionale (http://www.atestrie.com/MSR/VISITEUR/CADRE/cadre_principal.php) qui favorise les fruits, légumes et autres produits locaux. On commande par internet chaque semaine et on va chercher notre commande. Certains sont bios, d’autres non. La solution par excellence selon moi. Car le bio a tout prix n’est pas plus écolo.

  4. je suis actuellement dans une zone rurale en Roumanie, et c’est incroyable de voir à quel points les industriels ont réussit à convaincre les paysans que les plantes ne peuvent pas pousser sans leurs engrais. Nous commençons quelques cultures et les moqueries nous encouragent à leur prouver qu’ils ont été brainwashé toutes ces années… OK à une époque le rendement était nécessaire pour nourrir l’Europe après la guerre. Mais cette époque d’urgence est révolue

  5. @LGV, c’est vrai que l’agriculteur est « conditionné » par le marché (le choix des consommateurs), l’industrie (les innovations prometteuses) et parfois par un gouvernement (et là je pense à la PAC et à l’europe).

    Maintenant il faut réussir à prouver que d’autres méthodes sont viables et que l’agriculture intensive fait courir un risque important à notre éco-système et nos vies.

    Il n’y a qu’à voir les plantations de palmiers et les dégâts causés à la bio-diversité et aux petits paysans locaux qui sont chassés de leurs terres en tout impunité.

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